La fontaine de Véranne
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AQUA VAYRANA : Les chemins de l'eau.
La fontaine de Véranne.
L'histoire de la fontaine de Véranne n'est pas un long fleuve tranquille !
Voici les principaux épisodes de cette épopée.
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Dès sa naissance les difficultés sont bien là : en 1881, la fontaine située dans une écurie, ne fournit que très peu d'eau (1 litre toutes les 5 min et elle tarit les deux tiers de l'année !) et de très mauvaise qualité. Aussi le Conseil municipal décide de vendre des parcelles dans le Pilat pour financer, en même temps que l'école, une fontaine avec un abreuvoir et un lavoir. Mais le coût est très élevé et la réponse du Préfet pour une subvention tarde à venir et dès 1884 une souscription volontaire est ouverte afin que les habitants contribuent soit en argent soit en journées de travail. 161 F sont récoltés et 24 h de travail, quand le montant des travaux s'élève à 1103,85 F !
Les travaux se font quand même en 1885 mais le Préfet est furieux qu'ils aient été exécutés sans son accord, et lorsque le Maire déposera le 7 février 1886, une demande pour acquérir un terrain de 25 m2 afin d'y construire un réservoir, il faudra attendre le 18 décembre 1892 pour qu'un acte administratif soit signé. Seul le sous-sol du jardin du propriétaire est cédé 100 F pour y recevoir le réservoir et une servitude permettant aux agents communaux de réaliser entretien et travaux de réparation.
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La fontaine dans les années 1900
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Un nouveau problème allait défrayer la chronique tout au long de l'année 1904. Un premier épisode opposait le Maire, Mr Rivory à Etienne Beraud qui avait percé l'abreuvoir et détourné l'eau dans son jardin. Il avait dû réparer les dégâts à ses frais. Mais au moment des élections de 1904, Mr Beraud creuse une tranchée et capte la source jusqu'à sa basse-cour. Les Vérannaires doivent aller chercher l'eau au ruisseau tout l'été. Le 15 août le nouveau Maire Mr Mallecour envoie au Préfet une pétition signée par les habitants du bourg et des hameaux. En septembre, il renvoie un rapport circonstancié de l'affaire mais le Préfet se déclare incompétent et renvoie les protagonistes devant les tribunaux civils. Malgré nos recherches, nous n'avons rien trouvé concernant les suites données à cette affaire.
En 1912, la Municipalité dut avoir recours à l'emprunt pour faire face aux frais engagés pour un procès relatif au lavoir.
C'est en 1927 que la municipalité entreprit les premiers travaux avec le captage du Tout et la pose de canalisations qui alimentaient trois robinets dont l'un alimentait la fontaine.
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En 1992, bien des années plus tard, l'épisode de la « queue de renard » bouchant l'alimentation du bassin tampon (cet amas de racines entrelacées mesurait plus de 2 mètres!) est relaté par Mr Hubert Dumas, alors 2ème Adjoint, dans le Bulletin municipal n°5. Il y déclare également : « D'autres recherches nous ont permis de déterminer l'emplacement exact de cette source dont plus personne ne se souvenait ». Heureusement de nos jours, les SIG systèmes d'Information Géographique et logiciels de modélisation 2D/3D, et la Traçabilité ont remplacé une mémoire orale qui se perd vite d'une génération à l'autre.
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En 1996, à l'occasion des travaux de rénovation de la place du bourg, la canalisation de la Fontaine est remplacée et déplacée. Dans le BM n°10, J.Y. Rivory, Délégué à la voirie, écrit : « A noter, nous avons profité de l'ouverture de tranchée rue de la Fontaine pour effectuer le remplacement du tuyau amenant l'eau de la source de la Fontaine dans le lavoir sur la place. L'ancienne canalisation était très ancienne et passait dans des terrains privés et sous les habitations, aujourd'hui elle est raccordée directement à la source et suit le chemin communal, le petit réservoir a ainsi pu être supprimé. » On s'apercevra plus tard que ce bassin-tampon installé par nos anciens jouait en fait un rôle prépondérant pour la régularité de l'alimentation de la fontaine. Encore un savoir-faire perdu ou non respecté en 1996, mais qui de nos jours serait rattrapé par l'utilisation d'un logiciel de simulation ou d'un jumeau numérique.
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Plus grave est le différent né en 2006 lorsque la fontaine arrête complètement de couler, les employés municipaux en ayant assez de la réamorcer sans cesse à cause des déformations du tuyau « plymouth » installé lors des travaux de réfection de la rue de la Fontaine. Dans un premier temps, le Maire nous assure lors de l'entrevue du 30 octobre 2007 que le problème, sera rapidement résolu, dans le cadre du réaménagement du lavoir.
Promesse qui ne sera pas tenue puisque nous apprenons le 17 mars 2009, par un compte-rendu de Conseil Municipal paru dans la presse, que « la fontaine ne coulera plus ». Fort mécontents, nous décidons alors de lancer une grande enquête communale pour demander si les Vérannaires sont d'accord avec « une dépense communale afin de réhabiliter notre Fontaine du Bourg ».
En 2011, parallèlement à la poursuite de notre enquête, nous entreprenons des recherches aux archives départementales et enquêtons aussi sur le terrain pour trouver des possibilités de redonner vie à cette fontaine.
En 2016, dans le cadre du réaménagement de la place, la fontaine coule de nouveau mais sans son eau de source originelle. C'est en récupérant les eaux de pluie des toits de la mairie, alors stockées dans un réservoir situé sous le perron, qu'un circuit fermé alimente notre fontaine elle-même « modernisée » en aluminium, ainsi que les toilettes publiques.
Mais souvent verdâtre cette eau de pluie, certes recyclée, nous fait malgré tout regretter notre belle eau de source d'antan...
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En conclusion, de 1885 à aujourd'hui en 2025, l'eau a gardé son statut: elle est indispensable à toute vie sur Terre. Du fait des évolutions technologiques, sa prospection, sa captation, sa gestion, sa distribution, ses utilisations ont grandement évolué. D'une époque où il fallait se déplacer pour se la procurer, nous sommes passés à une période d'abondance avec l'eau à notre robinet.
Puis notre environnement a changé avec un réchauffement climatique préoccupant. Les mêmes sources ne permettent plus d'alimenter en 2025 que 30% des besoins de nos villages du Pilat. Les autres 70% étant issus d'un Rhône qui, lui aussi, voit son niveau baisser et ses glaciers fondre à vue d'oeil.
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Sans doute notre fontaine-lavoir de Véranne aimerait-elle reposer en paix avec son eau de source originelle. Qu'importe qu'elle n'ait plus aucune utilité sinon de mémoire ! Qu'importe si elle ne ressemble plus à celle d'origine ! Qu'importe que sa source se tarisse bientôt et que sa reconnexion à la fontaine demande un budget que les communes n'ont plus pour assurer leurs besoins !
Comme élément de notre patrimoine, laissons la donc vivre et rêver avec nous du passé...
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